Le demi sert-il à « protéger »
quelque chose.
Est-ce possible? une monnaie n'est qu'un outil neutre sans
intention. Un des avantages du demi réside, à
mon avis, dans le fait qu'il encourage les personnes qui l'utilisent
à le faire consciemment. Ce sont ses limites qui le rendent
intéressant. On choisit
d'utiliser le demi. On choisit
de dédier une certaine part de son budget à un pan de l'économie.
Et ce pan de l'économie n'inclut pas les multinationales. Est-ce
dire que si j'utilise le demi je ne peux plus participer au libre
marché mondial? Pas du tout. Parce que le demi est
« complémentaire ». Il s'utilise en parallèle au dollar
canadien (complet). Au lieu d'empêcher quoi que ce soit, il ajoute
une promesse que nous nous faisons à nous-mêmes. Lorsque j'ai
100-demi$ je sais que ceux-ci resteront à une échelle économique
humaine. Une échelle à laquelle tant du côté du consommateur que
du côté du commerçant il y aura eu une discussion. Un échange
commercial, mais aussi un échange humain. Est-ce seulement le demi
qui peut créer ça? Bien sûr que non! Mais comme la personne qui
souhaite faire un effort (pour la planète ou pour sa santé) et
utiliser un peu moins son véhicule, si elle n'a pas de bicyclette
chez elle ou ne connaît pas l'horaire des transports en commun, son intention ne
restera qu'une belle idée inexploitée. Le demi c'est un peu un
bizik ou un billet de bus dans ta poche: T'es pas obligé de le
prendre, mais au moins il est là. Pis comme ton bizik dans ta cour,
si tu l'utilises pas, il rouille.
Certaines personnes disent que l'apparition du demi est pour elles un constat d'échec au
niveau de l'achat local. C'est possible. Mais je crois qu'il gratte
un bobo encore plus gros, sinon pourquoi des institutions comme le
Time, Maclean's
et autres mastodontes de l'économie s'y intéresseraient-ils?
Pourrait-il soulever la question de notre rapport à l'argent?
Pourquoi la plupart des gens se trouvant face au demi ont-ils comme
première réaction un haut-le-coeur? Certaines personnes disent
« tant qu'à couper des billets en deux, aussi bien les donner
aux pauvres » ou « comment pourra-t-on un jour récupérer
cet argent ». Ces questions comme bien d'autres sont de bonnes
questions, mais elles soulignent aussi une certaine naïveté que
nous avons collectivement face à la place qu'occupent dans nos vies
l'argent et l'économie en général.
Un marché ne devrait pas
être enfermé autour d'une seule monnaie. Et c'est exactement
pourquoi les monnaies complémentaires viennent libérer les
consommateurs de l’hégémonie d'une monnaie unique comme le dollar
canadien en Gaspésie … par exemple. Une monnaie unique répond
rarement, même jamais, à tous les besoins de tout le monde (tout
le monde ne se définissant pas non plus comme des
« consommateurs »). C'est aussi pourquoi il existe plus
de 5000 monnaies parallèles dans le monde qui offrent une
panoplie de moyens pour élargir le spectre des possibilités pour y
arriver.
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